Du sujet à l'usager, de l'usager au client...

Publié le par catherinepolet

De la capacité à prendre un repas préparé :
 de l’usager « sujet » à l’ « usager client » ?

 

Pour développer un peu mon point de vue sur le type de problématique qu’induit à mon sens la grille « Evasion », je vais développer l’exemple de « la capacité à prendre un repas préparé »..

 

Si on l’analyse avec en tête l’assouvissement quantifiable d’un besoin (se nourrir) et des risques encourus à ce moment…on risque fort de se cantonner à un service minimum d’assistance immédiate : aide à s’alimenter, risque de fausse routes ou plus prosaïquement risques encourus en utilisant un matériel contondant, trop chaud, etc… !

 

Or avec les personnes  dites lourdement déficientes ou handicapées ou en difficulté psychique…la question de l’environnement et du contexte est primordiale… Nous connaissons tous des usagers incapables d’effectuer une même tache (y compris vitale en dehors d’un contexte repéré sécurisant, contenant et stimulant.

Sécurisant dans la mesure où il lui permet d’agir avec un minimum de risques pour un maximum de…satisfactions (bénéfices directement et indirectement liés à la nourriture).

Contenant dans la mesure où ce contexte répété lui permet de ne pas être « parasité »en permanence dans ses agirs les plus quotidiens, de pouvoir effectuer les actes liés à ce moment avec  l’autonomie possible et acceptable pour le sujet à ce moment de sa vie….

Et enfin stimulant dans la mesure où ce contexte, il est donné à la personne, sujet de sa propre vie et à elle seule, de s’en saisir pour en faire plus, éprouver d’autres satisfactions (par exemple la vie sociale et les échanges liée au repas..), se lancer dans des attitudes nouvelles et parfois des apprentissages tardifs…

 

La présence éducative, l’accompagnement lors des repas nécessite  pour les professionnels de mettre en œuvre bien plus qu’une présence à l’absorption d’aliments dans des conditions d’hygiène et de sécurité suffisante ! Bien sur, tous les éléments de « confort » permettant une meilleure accessibilité pour la personne à son repas doivent être pris en compte (mixer, couper en petits morceaux, tours d’assiettes…etc). Mais cela est loin de suffire, car pour tout un chacun, il y a interaction permanente entre le besoin…et des tas d’autres choses, c’est cela l’humaine condition !

Les « fausses routes » fréquentes  si une personne est très « énervée » lors du repas peuvent diminuer de façon significative (selon la cause) lorsque la personne aborde et vit le repas de façon plus sereine… Il s’agira alors de travailler sur l’espace utilisé (personnel et collectif), les relations possibles avec les autres (résidants ou encadrement) lors de ce moment, les exigences d’un moment de vie collectif et les aménagements individualisés qui peuvent y être apportés, les interactions verbales  qui ont lieu lors du repas, la place donnée (réelle et symbolique)  à chaque usager à ce moment précis dans le groupe de vie…

 

Concrètement, on voit bien que cette situation toute simple du repas ne peut se réduire en prestations de services quantifiables pour l’usager…ou pour faire plus « mode » le futur « client » que l’ex-« sujet », devenu « usager » ne saurait tarder devenir !

Comment faire le lien entre tout ce travail mis en oeuvre dans la vie quotidienne et la définition comptable de prestations de services délimitées  …Nous entendons souvent des collègues (AMP ou AS par exemple) nous expliquer combien il est difficile de travailler dans les structures pour personnes âgées où justement le temps d’accompagnement et de présence des personnels a été défini selon ce type de logique « besoins/services quantifiable »)…

Comment expliquer encore et encore que la vie est complexe, que la personne handicapée, comme toute personne humaine est complexe…La vie quotidienne ne peut se laisser enfermer dans une succession d’items rapides (…encore plus en Foyer Occupationnel / FAM), en effet de son adaptation (dans le sens de passerelles facilitatrices proposées au sujet, à chaque sujet) et de sa richesse dépendent la qualité de vie des personnes accueillies.

Publié dans Regard critique

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